"Sans titre" | 9ème Biennale Hors Normes, Lyon (F)

 

Le projet d’exposition “sans titre” est né, au temps du coronavirus, dans l’enthousiasme de conversations virtuelles assemblant malgré tout, entre Lyon et Liège, entre la BHN et le Trinkhall, un désir d’existence et de partage. De quoi sommes-nous orphelins ? Des lieux où ne pouvons plus aller ? Mais le confinement auquel nous sommes douloureusement réduits nous invite à repenser l’existence au départ de l’idée des confins, qui évoque à la fois les limites et les lointains. Exister est le verbe qui désigne l’action de se projeter hors de soi, hors de l’endroit où, simplement, l’on se tient. L’existence est une pratique de l’écart. Elle suppose à la fois l’ancrage et l’envol : le mouvement d’une flèche et sa cible indéterminée ! Ce que nous appelons « art » n’est pas autre chose que cela. L’atelier, à nos yeux, en est le laboratoire privilégié, le lieu d’un commun où doucement, silencieusement, naissent les envols, lucioles et libellules dont nos rêves sont peuplés. L’atelier est le lieu d’élection qui permet, bien au-delà de lui-même, de réfléchir et d’éprouver la condition artistique. Les ateliers, à travers le monde, métamorphosent en puissances les fragilités qu’ils accueillent. 

Le Trinkhall abrite plus de trois mille pièces réalisées par des personnes fragiles en contexte d’atelier. Elles viennent du monde entier et ont été patiemment collectées au cours des quarante dernières années. Nous en sommes les gardiens, comme d’un phare éclairant nos inquiétudes et nos espérances d’exister. Aujourd’hui, notre collection s’enrichit de l’œuvre de cinq artistes des ateliers du Créahm Liège (Créativité et handicap mental), avec lesquels le Trinkhall entretient des relations tout électives. Cinq artistes qui ont très fortement marqué l’histoire du Créahm : ensemble et chacun en leur lieu, ils disent, depuis plus de trente ans, la puissance expressive des mondes fragiles. Anny Servais, Patrick Hanocq, Pascal Tassini, Alain Meert et Michel Petiniot, comme la plupart des auteurs d’atelier, ne donnent pas de titre à leurs œuvres. Est-ce d’être indifférents à ce qu’elles peuvent devenir ? Est-ce d’être, eux-mêmes, sans titre ni qualité de convention, comme désencombrés du souci de plaire ou du fardeau d’être soi ? Est-ce d’être ainsi, oeuvrant heure après heure, jour après jour, année après année, au cœur battant du geste d’exister, dont ils disent à la fois la liberté et l’ascèse? Sans titre en bannière, le Trinkhall fait voyage à Lyon !

(L’exposition Sans titre sera également présentée au Trinkhall museum, au printemps 2022)

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